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Les habitants des quartiers ouest de Strasbourg ont raison de s'inquiéter : les inondations à venir seront plus graves, plus dangereuses et plus coûteuses. Le bassin de la Bruche et de la Mossig, avec son réseau hydrographique, concerne l'ensemble des structures où la vie s'organise, que ce soit pour le logement des habitants, pour l'industrie, pour la
circulation des personnes, pour l'élevage et les cultures viticoles, prairiales ou céréalières.
Les villages en plaine, à commencer par Schirmeck et tous ceux que la Bruche traverse, sont de plus en plus menacés pour des raisons, certes, dues à l'attitude irresponsables de certains élus influents, mais aussi aux changements climatiques qui nous amènent en quelques heures des pluies importantes accompagnées de coups de vent exceptionnels. Dire que les crues se répètent tous les 10 ou 50 ans, c'est sans doute pour calmer les esprits. La réalité est toute autre. Avait-on prévu en juin 2003 cette pluie qui, en deux heures, a fait débouler des collines des coulées de boue avec de graves conséquences pour les habitations et même des usines dont certaines ont dû arrêter leur production durant plusieurs semaines ?
Si les habitants s'inquiètent, à juste titre, il n'en est pas de même de certains élus, maires de villages, conseillers généraux et régionaux, élus nationaux qui, depuis plus de dix ans se sont opposés à la mise en place de la Commission locale de l'eau (CLE) pour la création d'un Schéma d'Aménagement et de Gestion des Eaux (SAGE), prévu par la loi de janvier 1992. Qui aurait pu s'imaginer que des élus, appartenant quasiment tous à la même mouvance politique, bloqueraient la mise en oeuvre d'une loi votée par l'ensemble des députés au Parlement français ?
Dans notre département, tout a été fait pour contourner les dispositions de cette loi qui prévoyait que l'ensemble des forces vives participent à cette commission, notamment des élus politiques pour moitié, les représentants des services de l'État, à raison de 25% , et les partenaires de la société civile (propriétaires, industriels, artisans, pécheurs et chasseurs et autres écoles) à raison de 25%. Pour contourner la loi sur l'Eau de janvier 1992, le Conseil Général mit en place une structure appelée SAGEECE, pilotée exclusivement par l'un de ses services, avec à sa tête un conseiller général du bassin hydrographique concerné. C'est fin 2003 qu'un SAGEECE fut décidé par le Conseil Général pour la Bruche (sans la Mossig) et une étude est en cours, réalisée par le bureau d'études SOGREAH!
Cette étude, une de plus (avec sans doute d'autres qui vont suivre, compte tenu de toutes celles faites depuis une vingtaine d'années), coûte excessivement cher et permet de gagner du temps afin de laisser à des groupes de pression la possibilité de détruire le milieu aquatique, avec comme seule logique de favoriser quelques intérêts particuliers.

Le constat des agissements depuis une douzaine d'années est accablant :

  • Le déboisement des collines pour y implanter des vignes, avec comme conséquences des coulées de boue à chaque forte pluie.
  • Le retournement de près de 10 000 ha de prairies en Alsace pour planter des céréales dont une grande partie le long de la Mossig, de la Bruche, du Dachsteinerbach et de l'Altorfarm, avec comme conséquence l'eau en torrents de boue lors des crues.
  • Le drainage de dizaines d'hectares de roselières, subventionné avec l'argent du contribuable, avec comme conséquence l'assèchement des ruisseaux en période d'étiage.
  • La construction de lotissements au bord de la Bruche et ses affluents, le rétrécissement de la zone inondable par la construction d'industries le long de la Bruche, et l'approfondissement du lit mineur, aberration qui accélère l'évacuation de l'eau vers l'aval.

La bruche en crue

Oui, les habitants des faubourgs strasbourgeois ont des raisons d'être inquiets, car les prochaines crues seront inévitablement plus rapides à venir, leur niveau sera inévitablement plus haut et elles seront chargées de boues nitratées et de pesticides. Mais ce que l'on ne voit pas est encore plus grave : pendant ces crues, les eaux d'épandage, qui jadis étaient filtrées par les prés, vont alimenter la nappe phréatique avec des doses importantes d'engrais et de pesticides, augmentant ainsi considérablement et rapidement la pollution des eaux destinées à la consommation humaine.
Au début des années 1990, le Directeur de l'Agriculture de l'époque, Monsieur de Gouvelot, nous avait promis que l'arrêté préfectoral de protection des zones inondables du bassin de la Bruche était prêt pour la signature. Trouver les responsables de la non-signature, c'est connaître les responsables de la situation actuelle.
Par ailleurs, les boues évacuées par la Bruche s'entassent dans l'Ill, augmentant la fréquence des crues jusqu'à sa confluence avec le Rhin qui est, en aval de Strasbourg, de moins bonne qualité que du côté du Rohrschollen.

                                                                                                                    Marcel CARABIN

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